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Quelques réflexions sur l'économie politique ou la politique économique

Publié le 2 Septembre 2014

LE CAPITALISME CASTRE ET LE PIEGE DE L’ENTREPRENEURIAT

Alors que les distributions de dividendes atteignent dans tous les pays avancés des sommets historiques, le nombre de faillites de petites et moyennes entreprises flirte lui aussi avec de nouveaux records.

Y aurait-il plusieurs formes de capitalisme ? Un capitalisme sans risque, contraire à toutes les théories financières, et un capitalisme laborieux ?

Les dernières mesures prises par les gouvernements montrent qu’un certain capitalisme bénéficie de mesures d’aubaines qui n’a pour seul objectif que de grossir sans frais les bénéfices des multinationales. C’est le nursing capitalisme. Les réductions de cotisations patronales si elles vont percoler jusqu’au bottom line des grands groupes pour des montants conséquents ne modifieront pas la situation précaire de bon nombre de petits entrepreneurs. Que changeront quelques milliers € d’économie sur la masse salariale d’une PME qui emploie une dizaine de personnes ? En sera-t-elle plus compétitive ? C’est illusoire. Les transnationales ont développé depuis une trentaine d’année une nouvelle politique commerciale exempte de risque. Rares sont les nouveaux produits lancés, plus rare encore est leur succès. Les évolutions technologiques se font moins nombreuses. Depuis les années 90, quelle invention a révolutionné le monde à l’exception d’Internet ? Où sont les voitures efficientes en matière énergétique que l’on nous promet de longue date ? Alors que des modèles tout électriques et dépassant les 100km/h étaient déjà commercialisés en 1910. Où sont les médicaments qui devraient nous guérir de toutes les affections ? Depuis que l’on a cartographié le génome humain, il n’y a jamais aussi peu de nouvelles molécules mises sur le marché. Panne d’innovation, recul des dépenses en recherches et développement caractérisent ces trois dernières décennies. Les grands groupes pharmaceutiques et autres préfèrent acquérir des concurrents plus dynamiques que de procéder au développement interne et bien souvent l’utilisation qu’ils font de leurs acquisitions laisse à désirer. Il en est de même des efforts commerciaux, l’essentiel des sociétés réduisent leurs forces commerciales de Pfizer à ING pour augmenter leurs frais de publicité. De quel accueil jouissons-nous encore dans une banque, de quelle qualité de conseil ? Toute demande de crédit est confiée à un comité situé au siège et éventuellement octroyé sur base de techniques de credit scoring et son obtention nécessite des garanties qui permettent aux institutions bancaires d’approcher le risque nul. Est-ce ça que le capitalisme ? Quant à la conquête de nouveaux marchés, les transnationales s’en sont remises à nos gouvernements et à la Commission Européenne pour la réaliser à leur place. Elles ont obtenu de ces instances la suppression des barrières tarifaires et au travers du Traité transatlantique cherchent à obtenir la suppression de toutes les autres barrières. Harmonisation des normes, dispositions juridiques remplacent aujourd’hui le business development manager. Plus besoin de s’enquérir des habitudes de consommation de l’une ou l’autre région du monde, tout est à l’uniformisation. Ce grand marché reposant sur le fallacieux principe de la concurrence libre et non faussée permet en fait de réduire le nombre de produits proposés. Le consommateur voit son choix se réduire de jour en jour. A côté de cette tendance à la favorisation des plus grands groupes, les fédérations patronales et nos hommes politiques continuent de vanter l’esprit d’entreprise, la liberté d’entreprendre, le petit entrepreneur, héros des temps modernes. Mais est ce que dans ce cas ci, il ne convient pas plutôt de parler de « pris entre » que d’entreprise. L’entrepreneur, le vrai, est pris entre la concurrence des sociétés bénéficiant d’économies d’échelle sans cesse plus importantes, pouvant délocaliser pour bénéficier de régimes sociaux et fiscaux plus avantageux et la contraction du pouvoir d’achat dans son pays d’établissement. L’entrepreneur, le vrai, met une grande partie de ses capitaux, de son épargne dans la constitution de sa société, au risque de tout perdre. Alors que l’actionnaire en Bourse, le manager doté de parachute doré ne prend en aucune façon des risques équivalents. Par ailleurs, de plus en plus d’ex salariés, licenciés ou ne trouvant plus leur compte dans des sociétés aux pratiques sans cesse plus réglementées sont contraints de lancer parfois contre leur volonté un petit business qui leur permettrait de survivre. Dans ce discours pro entrepreneuriat, nos gouvernements omettent de dire que 3 entreprises sur 5 meurent durant les 5 premières années de leur activité. Quel gâchis, quelle dilapidation d’efforts de temps et d’énergie mais aussi d’argent. Nos politiques continueront néanmoins à promouvoir cet esprit d’entreprise, qu’il nous faudrait développer dès l’école, car le lancement de toute activité permet de faire tourner la machine, d’employer quelques salariés supplémentaires, de payer quelques loyers, de leaser quelques machines, d’emprunter aux banques, de payer quelques taxes le temps d’un temps dans un grand nombre de cas. L’entrepreneuriat serait il un piège ? Pour la première fois dans certains pays, le nombre d’indépendants est en train de s’accroître. La phase de salarisation de l’économie qui avait pris naissance avec la Révolution industrielle a atteint son pic. Certes, le salariat peut dans certains cas être assimilé à du servage mais un indépendant est tout sauf indépendant. Il dépend de ses financiers, de ses clients, de ses fournisseurs. Il nécessite pour une rémunération souvent tout aussi modeste que celle de son homologue salarié beaucoup plus d’efforts mais qui plus est ce statut crée aussi d’autres travers: il pousse à l’individualisme. Confronté au quotidien à une lutte pour sa survie, l’indépendant défend les concepts dangereux de responsabilisation et d’autonomie. Il en vient dès lors à cautionner les politiques libérales qui elles aussi mettent en avant ces beaux principes. Il n’accepte pas que d’autres qui n’ont pas nécessairement leurs compétences profitent de l’assistanat public et des propos comme celle de Mme Lagarde disant que les chômeurs n’ont qu’à lancer leur propre entreprise n’offusquent dès lors plus. Cet individualisme mène à une désolidarisation, au chacun pour soi que ces petits patrons viennent à défendre oubliant qu’ils sont parfois presque aussi mal lotis que les chômeurs et que ces politiques dont ils valident les idées ne les considèrent comme des faire- valoir qu’en cas de réussite.

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